lundi 26 février 2007

Le lobbying des religions

Le lobbying des religions (ou plus exactement des « communautés de religieux », cf. mon livre Dieu est dans l’isoloir) existe depuis longtemps, et s’il varie en modalités et en intensité d’une communauté à l’autre, il se pratique comme M. Jourdain faisait des vers : sans que nul ne s’en aperçoive.
En revanche, le mandating n’est pas fréquent. On connaît certes le dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), qui se tient traditionnellement début janvier, et où se rend une grande partie de la classe politique – mais c’est une manifestation qui n’équivaut pas à ce qui s’est fait mardi dernier à la maison de la Chimie. De même, le Conseil français du culte musulman (CFCM), qui a déjà du mal à réunir ses propres membres, est loin d’avoir le potentiel mobilisateur des chasseurs.
Quant aux catholiques, ils sont aux prises avec un débat qui va en s’accentuant et que l’on croyait pourtant réglé depuis le Concile Vatican II : qui se charge de défendre et promouvoir dans le champ politique la
« vision » des catholiques sur tel ou tel point ? Était-il, par exemple, judicieux que le cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, signât seul pour l’Église catholique la déclaration interreligieuse sur le mariage homosexuel, quand ses partenaires comptaient chacun un religieux et un laïc ? Est-il juste, efficace, habile, évangélique que la voix des catholiques dans le domaine public soit portée par leurs seuls évêques ?
Ne pourrait-on envisager, aux côtés de la Conférence des évêques de France, un ou plusieurs «CRIF catholiques», dirigés par des laïcs ? Les hommes et femmes de talent ne manquent pas au sein de la communauté catholique.
Il serait intéressant d’explorer les voies étrangères où la parole catholique se fait entendre ainsi, librement, dans le cadre propre de la responsabilité politique des laïcs, de telle sorte que les autorités de l’Église soient préservées des détails d’intendance, et se concentrent sur l'essentiel…
Entre instances dirigées par des laïcs, les démarches du type de celle entreprise par les responsables religieux de la région lyonnaise contre le mariage homosexuel pourraient devenir courantes – et dessiner ainsi le visage d’une société civile organisée dans toutes ses dimensions, signe d’une bonne santé démocratique. Le forum de la FNC s’intitulait « La chasse en campagne ». À quand « La foi en campagne » ?
Nous pensions la religion reléguée au domaine privé. Elle resurgit avec force. Aujourd'hui, elle est au cœur du débat social, culturel et politique. Mais sur un mode totalement nouveau. Mesurer son influence en comptabilisant les pratiquants du vendredi, du samedi ou du dimanche n'a plus de sens. Il convient de trouver de nouveaux outils d'analyse. Car en vingt ans, les Français ont considérablement changé : ils ne sont plus un peuple homogène, habitué aux seules valeurs judéo-chrétiennes, bercé au son des cloches, des cocoricos et de La Marseillaise... C'est l'appartenance religieuse, l'identité confessionnelle qui sont sur le devant de la scène, nourrissant le phénomène majeur de ces dernières années : le communautarisme. Et chaque religion se veut porteuse de revendications, sur la famille, le cadre de vie, le lien social, la culture, l'éducation... Et sur la politique. Quel est le nouveau poids des religions dans l'arène publique ? Pour répondre à cette question, l'auteur nous livre un ouvrage qui est à la fois une enquête documentée et un guide de l'" électeur religieux ". En filigrane se profile le plus important : ce que les principales confessions présentes sur le territoire français ont à dire à notre vieille République.
*Matthieu Grimpret, 28 ans, est essayiste, il vit entre Paris et la Vendée. Diplômé de Sciences Po Paris, professeur d'histoire, il a étudié la philosophie et la théologie au Studium de la Castille (Var) et à l'Université St Thomas dans le Minnesota (Etats-Unis). Fondateur en l'an 2000 du premier portail catholique français, ChristiCity.com, il est notamment l'auteur de La Révolution de Dieu … il est donc jeune, catholique et heureux de l'être (Anne Carrière, 2000) il réitère en faisant paraître
Dieu est dans l’isoloir, Politique et religions, des retrouvailles que Marianne n’avait pas prévues, Presses de la renaissance, 01/2007, 268 p. 18€

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